Pirates normands au IXe siècle est une toile d'Évariste-Vital Luminais (1894) représentant des vikings enlevant des femmes. Elle illustre le stéréotype du viking pilleur et violeur.
Évariste-Vital Luminais est un peintre français né à Nantes en 1822. Élève de Coignet et de Troyon, il peint d'abord des scènes de genre inspirées de la vie quotidienne en Bretagne. À partir de la deuxième moitié des années 1860, il s'adonne principalement à la peinture historique, dans une approche historiciste. Ses thèmes de prédilection sont les Gaulois (il est le « peintre des Gaules », pour reprendre le nom d'une exposition qui lui fut consacrée à Carcassonne en 2002) et les Mérovingiens (pour un critique contemporain, il est « l'Augustin Thierry de la peinture »). Sa toile la plus célèbre, Les Énervés de Jumièges (1880), illustre d'ailleurs une légende se déroulant sous le règne de Clovis II. Bien qu'il manifeste un certain souci archéologique, les anachronismes ne manquent pas dans son œuvre. Luminais meurt en 1896 à Paris.
Pirates normands au IXe siècle, présenté au Salon de 1894, aujourd'hui exposé au musée Anne de Beaujeu de Moulins (Allier), représente deux femmes enlevées par des guerriers vikings (identifiables, en plus du titre, à la figure de proue de leur navire en forme de dragon, et éventuellement à leur hache, encore que les haches à tranchant asymétrique ne soient pas propres aux vikings).
Les enlèvements commis par les vikings étaient effectivement courants, les victimes étant destinées à être vendues comme esclaves ou à être rachetées contre rançon. Mais ici, la dimension sexuelle est manifeste.
« Mais le personnage principal, inondé d’une lumière qui capte immédiatement notre attention, est une jeune femme blonde, emmenée de force par les deux hommes. Dans l’ardeur de la lutte, ses vêtements se sont déchirés et ils laissent voir sa poitrine blanche. À l’arrière-plan, une autre victime est sur le point d’être hissée à bord du bateau, évanouie. Sa robe est si mouillée qu’elle moule sa silhouette de façon très sensuelle.1»
Le tableau reprend ainsi l'un des clichés les plus répandus sur les vikings, vus comme des pilleurs et des violeurs. C'est sans doute à ce titre qu'il figure dans de nombreux ouvrages français consacrés au vikings2.
Le Barbare qui laisse libre cours à ses pulsions et pour qui les femmes représentent une prise de guerre est devenu une figure récurrente dans la littérature romantique du XIXe siècle, aussi bien en Scandinavie qu'au-delà3.
Cette image a alimenté la représentation populaire des vikings jusqu'à nos jours. Le viol est ainsi un topos dans les films ou séries mettant en scène des vikings. Les Vikings de Richard Fleischer montre ainsi un enlèvement (le viol est elliptique) dès sa scène d'ouverture, et il est à plusieurs reprises question de viol dans la série télévisée Vikings (2013-).
Une publicité pour un shampoing montre un viking enlevant une femme (1975).
Couverture de la bande dessinée pornographique Vikings.Le thème de la violence sexuelle est à plus forte raison présente dans les romans d'amour ou pornographiques historiques, qui sont nombreux à prendre des vikings pour protagonistes (avec quantité de titres sur le modèle L'Esclave du Viking).
La réalité apparaît cependant beaucoup plus nuancée. Si, certainement, les vikings se sont rendus coupables de violences sexuelles, comme d'autres peuples, à leur époque et à d'autres, dans un contexte guerrier, il ne ressort cependant pas des sources contemporaines qu'ils aient été particulièrement enclins au viol4.