Gleipnir est le lien magique utilisé par les dieux pour enchaîner le loup Fenrir jusqu'aux Ragnarök.
Le mythe de l'enchaînement de Fenrir est évoqué par Snorri Sturluson dans l'Edda (Gylfaginning, ch. 34).
Avertis par des prophéties du mal que leur causerait Fenrir, les dieux décidèrent de l'élever auprès d'eux. Mais, à mesure qu'il grandissait, il devenait de plus en plus puissant. Aussi tentèrent-ils de l'enchaîner.
Ils fabriquèrent d'abord un lien très fort nommé Lœðing (étymologie incertaine1). Ils invitère le loup à éprouver sa force, et Fenrir brisa le lien au premier effort. Ils fabriquèrent ensuite un autre lien, deux fois plus solide, nommé Drómi (« entrave »), et invitèrent de nouveau le loup à éprouver sa force, faisant valoir qu'il acquérerait grande renommée s'il parvenait à briser le lien. Convaincu, Fenrir se laissa enchaîner, et réussit aussi à se libérer de Drómi
Óðinn envoya alors Skírnir, le messager de Freyr, à Svartálfaheimr, chez les nains, pour leur faire forger le lien nommé Gleipnir. Il est composé de six éléments : le bruit du saut d'un chat, la barbe d'une femme, les racines d'une montagne, les tendons d'un ours, le souffle d'un poisson et la salive d'un oiseau. Il était lisse et doux comme un ruban de soie, tout en étant solide et fort.
Les Ases se rendirent alors au lac Ámsvartnir (peut-être « tout noir »), sur l'îlot nommé Lyngvi (nom construit sur « lyng » : « bruyère »). Ils défièrent le loup de déchirer Gleipnir. Devinant un piège, celui-ci finit par accepter de se laisser passer le lien à condition qu'un des Ases plaçât sa main dans sa gueule. Týr accepta. Quand le loup s'arc-bouta, le lien se durcit, et, plus il se débattait, plus le lien devenait solide. Tous rirent, sauf Týr, qui y laissa sa main.
Les Ases prirent alors la corde située à l'extrêmité du lien – elle se nomme Gelgja (« tige », « pieu » en vieux norrois) – et la tirèrent en travers d'une grande pierre plate nommée Gjöll (étymologie incertaine, mais peut-être en rapport avec l'idée de largeur), qu'ils fixèrent profondément en terre. Un grand rocher, nommé Þviti (du verbe « þveita » : « frapper »), fut enfoncé encore plus profondément et servit de pieu d'attache.
L'étymologie de Gleipnir est obscure. Le nom dérive sans doute du verbe « gleipa », dont Jan de Vries propose deux traductions : « se moquer » (« spotten ») et « être béant » (« klaffen »)2. Les traductions de Gleipnir dérivent soit du premier sens – ainsi Axel Kock a suggéré « farceur » (« Spassmacher »), en raison du caractère faussement inoffensif du lien3,soit du second – de Vries propose ainsi « dévoreur » (« Verschlinger »)4.