Runes (2011) est un roman policier de Pierre-Olivier Lombarteix dans lequel un criminel surnommé le Viking commet une série de meurtres à Dublin.
Ce poème anonyme d'un moine irlandais est cité en exergue du roman, où il est daté du XIIe siècle. Il figure en réalité en marge d'un manuscrit du milieu du IXe siècle, sans doute composé dans un monastère du nord de l'Irlande, peut-être celui du Bangor ou de Nendrum.
Runes, paru en 2011 aux Éditions du Temps, est un roman policier de Pierre-Olivier Lombarteix faisant suite à Ogham (2010). L'héroïne, Deirdre McNeill, jeune ethnologue enseignant à Trinity College Dublin, y traquait un assassin surnommé le Druide, qui signait ses crimes par des inscriptions en alphabet gaélique.
Dans Runes, l'assassin est le Viking, et il laisse sur le cadavre de ses victimes un galet gravé d'une rune (, , puis , même si cette dernière fait partie de l'ancien fuþark, antérieur à la période viking).
D'autres éléments renvoient aux us vikings : l'une des victimes – nommée Lindisfarne, en référence, peut-être, au monastère – est retrouvée les narines bouchées et la bouche cousue, un motif inspiré du rite funéraire accompli par Egill sur le corps de son père Skalla-Grímr (Egils saga, ch. 59) ; sur le mur de la chambre d'une autre est écrite en lettres de sang la formule Niaut kubls ual (« Jouis bien de ta tombe »), qui figure sur les pierres runiques danoise de Gørlev et de Nørre Nærå.
Le roman est prétexte à une présentation des vikings, au-delà des stéréotypes, par Deirdre ou par son collègue, le Norvégien Erik Haraldsson, un professeur de littérature médiévale scandinave séjournant à Dublin, soucieux de réhabiliter l'héritage de ses ancêtres : « nous n'étions pas que des barbares assoiffés de sang et de richesse, mais un peuple civilisé et cultivé », affirme-t-il.
Est évoquée la présence viking en Irlande, avec les premières incursions en 795 ou le royaume de Dublin, avec Ivar et Olaf. Que le dénouement de l'intrigue se déroule à Clontarf est significatif, référence, peut-être, à la bataille qui y fut livrée en 1014 et symbolise le déclin de la domination scandinave sur l'île. Sont mentionnés divers apports des vikings à l'histoire de l'Irlande, ainsi de la fondation de villes telles que Cork, Limerick ou Wexford, ou de l'introduction de la monnaie.
La civilisation viking est présentée de façon plus générale. Les vikings sont dépeints, non seulement comme des pillards sanguinaires (le motif du berserk est cité, même si le contexte aurait plutôt exigé l'emploi de berserksgangr) et avides (prélevant par exemple le Danegeld), mais aussi comme des marchands habiles et des explorateurs intrépides, des hommes épris de science et de culture – sont en particuliers évoqués les sagas et les scaldes, avec leurs kennings, formant une société en avance sur son temps, qu'il s'agisse des instances judiciaires et législatives « assez démocratique », les things, ou de la condition des femmes. Il est au passage rappelé que les casques à cornes sont dépourvus de toute réalité historique.
1 (encore que, pour l'Edda, certainement pas le Codex Regius, comme il est prétendu), tel n'est pas le cas pour la Gesta Danorum.
L'enquête donne l'occasion à Deirdre de découvrir cette civilisation. Après avoir consulté des livres, elle emprunte quatre manuscrits à la bibliothèque de Trinity College : les Annales d'Ulster, la Gesta Danorum, l'Edda de Snorri et la Saga d'Egill, fils de Grimmr le Chauve. Si la bibliothèque de l'université possède bien le manuscrit original des Annales d'Ulster, et si des manuscrits de l'Edda et de la saga sont bien accessibles à DublinLa présentation que fait l'auteur de ces œuvres conduit à nuancer la véracité des références historiques et culturelles dont il se prévaut dans son avant-propos. Si la Gesta Danorum compte bien seize livres « rédigés[s] dans un latin érudit et raffiné », il est inexact d'affirmer que son auteur, Saxo Grammaticus, « venait d'Europe continentale, vraisemblablement des Pays-Bas ». De même, si Lombarteix rend justice à l'érudition de Snorri, l'Edda en prose n'est assurément pas constituée de « chants magnifiques, composés en vieux norrois, mais traduits en latin et couchés sur du vélin par Sturluson ». À signaler que Deirdre doit manifestement lire ces manuscrits en diagonale, puisqu'au terme de la lecture de l'Edda, elle n'est pas capable de comprendre la kenning « père du loup » appliquée à Loki...
La clé de l'énigme est fournie à Deirdre par la kenning « nourrir l'aigle », l'occasion pour elle d'affirmer que « pour savoir ce qu'est un (sic) kenning, et encore plus pour le comprendre, il faut être versé dans la culture viking. Il faut la connaître sur le bout des doigts, être érudit en la matière ». Il n'est cependant pas nécessaire de posséder des trésors d'érudition pour comprendre le sens d'une kenning aussi banale.