Le Þorleifs þáttr jarlsskálds (« Dit de Þorleifr jarlsskáld ») est un þáttr racontant, sur fond de pratiques magiques, comment Þorleifr se vengea du jarl Hákon.

Début du Þorleifs þáttr jarlsskálds dans le FlateyarbókLe début du Þorleifs þáttr jarlsskálds dans la Flateyarbók.
Stofnun Árna Magnússonar, Reykjavík.
Le þáttr débute par une mise en garde contre le paganisme à travers une dénonciation de Hákon, jarl des Hlaðir.

Þorleifr, un Islandais, excellent scalde, magicien, fut déclaré hors-la-loi suite à un meurtre. Il partit pour la Norvège où il rencontra le jarl Hákon. Comme il refusait de lui vendre sa marchandise, Hákon s'en empara, brûla le navire et fit pendre les compagnons de Þorleifr.

Þorleifr séjourna ensuite au Danemark, auprès du roi Sveinn tjúguskegg. Puis il retourna en Norvège déguisé en mendiant et s'introduisit auprès du jarl Hákon lors d'un banquet. Il déclama alors le Jarlnið (« Poème infamant sur le jarl ») provoquant d'abord des démangeaisons chez le jarl. Puis, l'obscurité se fit, les armes se déplacèrent toutes seules, et plusieurs hommes furent tués. Le jarl s'évanouit et, quand il se réveilla, sa barbe avait pourri et il avait perdu la moitié de ses cheveux. Après un séjour auprès de Sveinn, Þorleifr retourna en Islande, muni des cadeaux du roi.

Résolu à se venger, Hákon invoqua Þorgerðr Hörgabrúðr et Irpa. D'un morceau de bois et du cœur d'un homme qu'il avait fait tuer, il créa une créature ayant l'apparence humaine, qu'il envoya en Islande tuer Þorleifr. Celle-ci accomplit sa mission.

Un berger, Hallbjörn, souhaitait composer un poème de louange pour Þorleifr. Une nuit qu'il dormait sur son tertre, Þorleifr lui apparut. Il lui enseigna une strophe et Hallbjörn devint un grand scalde.

Le Þorleifs þáttr jarlsskálds ne saurait prétendre au réalisme, bien que sa structure soit comparable à celle des autres Íslendigaþættir : voyage d'un Islandais qui rencontre un roi et retourne enrichi au pays. Mais il incorpore aussi des motifs de contes de fées et autres éléments fantastiques : l'épisode mettant en scène Hallbjörn, par exemple, pourrait provenir de l'Historia ecclesiastica de Bède le Vénérable (l'histoire de Caedmon) ou d'un miracle attribué à Bède lui-même.

Þorleifr n'en as pas moins existé. C'est un personnage de la Svarfðæla saga – le þáttr s'appuie d'ailleurs sans doute sur une version plus ancienne et aujourd'hui disparue de cette saga. Il est de plus cité dans le Skáldatal parmi les scaldes du jarl Hákon, et une strophe et demie d'une drápa composée pour lui a été conservée.

Le nið composé contre Hákon n'est pas non plus une invention de l'auteur du þáttr, puisqu'il est déjà évoqué dans l'Ólafs saga Tryggvasonar d'Oddr Snorrason, ainsi que dans le Sneglu-Halla þáttr.

Le Þorleifs þáttr, qui a dû être composé vers 1300, est conservé dans la Flateyjarbók.

Traductions

  • Le Dit de Þorleifr scalde du jarl. In : Boyer, Régis. Les Sagas miniatures (þættir). Paris : Les Belles Lettres, 1999.
  • The Tale of Tholeif, the Earl's Poet. Transl. by Judith Jesch. In : The complete sagas of Icelanders, including 49 tales. Vol. I. General editor, Viðar Hreinsson ; editorial team, Robert Cook et al. ; introduction by Robert Kellogg. Reykjavík : Leifur Eiríksson Publishing, 1997.